
Il y a la mer du Nord, au loin les falaises anglaises, les bateaux qui passent comme des rêves de voyages. Il y la plage, les dunes, des hiboux et des oies sauvages. Il y a, tout près, perdu en pleine nature, quelques baraques de bric et de broc où vivent Anatole, Loïk et Lucille. Au dehors, c’est la ville, le port et le chantier monstrueux où travaille Loïk. Les trois se sont construit une petite communauté de peu, une presque famille unie par un attachement pudique, deux oncles bourrus, approximatifs et leur nièce de fortune. La vie s’y écoule, doucement chaotique, faite de petites joies, de rires et de mélancolie, et Jean Gabin n’est jamais très loin. Parfois ça se chamaille un peu, mais quand ça tangue à l’extérieur on sait se tenir chaud. Jusqu’au moment où tout bascule dans le drame. Bêtement, pour des conneries, des trois fois rien qui se transforment en machine à broyer, comme celle que conduit Loïk. Loïk, son goût pour le désastre, ses fêlures et sa colère à fleur de peau qui ne demande qu’à exploser.
L’auteur de L’horizon qui nous manque est un enfant du Nord et cela se sent à la lecture de son dernier roman. C’est un récit bleu comme un ciel printanier, plein de sable, de vent iodé et de cris d’oiseaux. Il a un parfum de bière et de salicorne. C’est aussi un roman amer et gris, d’un gris poisseux comme un ciel flamand des mauvais jours. Une belle et poignante chronique, entre tendresse et violence, accompagnée par les mots de Gabin et superbement mise en musique par Pascal Dessaint.
L’horizon qui nous manque
Pascal Dessaint
Rivages Noir
250 p – 19 €